• MARX PEUT ATTENDRE de Marco Bellocchio

    et

    HESTER STREET de Joan Micklin Silver

     

    Semaine du 20 au 26 décembre 2023



     

    MARX PEUT ATTENDRE. Marco Bellocchio, 84 ans, nous a donné en 2023 deux oeuvres superbes. Au cinéma L’enlèvement et sur les petits écrans la mini-série Esterno Notte (l’enlèvement et  l’assassinat d’Aldo Moro). Mais Marco Bellocchio est aussi documentariste et c’est à ce titre qu’en 2021 il réalisa Marx peut attendre où il s’attache à la personnalité de son frère jumeau Camillo qui à l’âge de 29 ans s’est donné la mort.

    Près de cinquante ans plus tard, Marco Bellocchio rassemble toute sa famille pour un déjeuner. Avec sa famille il s'interroge sur Camillo. Les frères. Les petits-enfants. La sœur de la petite amie de l'époque. Un psychiatre. Un prêtre. En parlant avec chacun d'eux, en se remémorant ces années et ces faits, Marco reconstitue les morceaux du passé, donnant enfin corps à un fantôme qu'il a côtoyé toute sa vie. À travers sa famille, il fait revivre l'histoire de son frère, sans filtres ni pudeur, presque comme une enquête, qui reconstitue une époque et tisse le fil rouge de son cinéma.

    Sous forme d’hommage à Camillo, Marco Bellocchio livre un recueil sur la figure énigmatique de son jumeau, évoquant à demi-mots la culpabilité des vivants à travers les gestes que lui comme ses frères et soeurs auraient pu, ou dû faire. Le cinéaste respecte la version de chacun. Il ne confronte jamais les témoignages opposés. La force du récit est de laisser se heurter ces témoignages, ces ruptures d’un récit commun qui se révèlera éparse. Ces contradictions narratives brutales bousculent le spectateur et l’amènent à la réflexion. On imagine que le film se prolongera hors champ, lorsque tous les protagonistes de cette famille découvriront à la projection les versions différentes de leur histoire familiale.

    Marco rend justice à son frère Camillo, abandonné à la tristesse par ceux qui ne s’en rendaient pas compte. Le titre, une phrase dite à l’époque par Camillo, occupé à tenter de survivre, à son cinéaste de gauche de frère, alors fervent maoïste.

    Un remarquable documentaire.

     

    Semaine du 20 au 26 décembre 2023

    HESTER STREET. Cinéaste indépendante Joan Micklin Silver (1935-2020) tourne ses 2 premiers métrages, Hester street (1975) et Between the Lines (1977) , à une époque où les réalisatrices ne sont pas nombreuses dans le cinéma américain. Formant un couple ambitieux avec son mari Raphael D. Silver - elle à la réalisation, lui à la production- elle se fait rapidement une solide réputation. Marquée par ses racines juives et les problématiques de  l’époque, sa filmographie interroge des thématiques clés de la société américaine, telles que la tradition, la modernité, l’indépendance et le déracinement.

    Fille d’émigrés juifs partis de Russie, elle a été professeur de musique, dramaturge, puis scénariste et réalisatrice de courts métrages à vocation éducative. Quand elle décide de mener à bien Hester Street les grandes compagnies ne la suivent pas, jugeant que son sujet n’intéresserait qu’un public juif, ne lui offrant qu’une audience limitée. Avec son mari ils créent leur propre société Midwest Films Productions. Hester Street bénéficiera d’un excellent accueil de la critique et du public et d’une nomination aux Oscars pour son actrice Carol Kane.

    L’action se situe dans le New York juif de la fin du XIXe siècle. Jake, Juif immigré, a quitté la Russie il y a trois ans laissant derrière lui sa femme Gilt et leur petit garçon. Travaillant dans un atelier de couture et fréquentant la belle Mamie, il fait tout pour s’intégrer. Installé, il peut désormais faire venir femme et enfant. Mais Gilt, attachée aux traditions orthodoxes, est déroutée par cette nouvelle vie.

    Dans un noir et blanc proche de la mémoire photographique héritée de cette époque, la réalisatrice filme une période essentielle dans la construction des États-Unis. À la recherche d’une vie meilleure, les émigrants juifs se découvrent partagés entre deux mondes: l’ancien, celui des ghettos de l’Europe de l’Est et le nouveau, celui de l’American Way of Life. Et c’est en filmant l’intimité d’un couple que la cinéaste étudie l’évolution des caractères, ceux qui veulent se fondre dans leur nouvel environnement ceux qui essaient de rester fidèles à leur judéité et à leur culture.

    Pour les jours et horaires de projection cliquer en haut de la page sur NOS PROGRAMMES/CINÉMA VICTORIA

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